Nouveautés 2009

Hugues a écrit:
et ma foi, ce Neko Case est magnifique. Il suffit de l'écouter au casque et c'est l'enchantement pur et immédiat. Cette musique enrobe l'appareil auditif et l'esprit comme une voûte céleste, et les tympans se pâment.

Un bon disque effectivemnent ... mais comme tu sembles le dire - implicitement - cela tient plus à la production qu'aux compositions elles-mêmes. Pour ma part, je trouve effectivement le disque hyper bien produit avec un son intéressant, mais j'ai beaucoup de mal à garder les morceaux en têtes. En fait, à part la reprise de Sparks, je ne retiens presque rien. Je l'ai écouté une bonne dizaine de fois, et pourtant, je serais bien incapable de te fredonner la moindre composition.

Tout le contraire du disque de Wilco, dont chaque morceau te trottent dans la tête (généralement à ton insu). Le Wilco m'a déçu également, dans le sens où je le trouve un brin pépère, peu novateur par rapport aux disques précédents, avec quelques resucées dispensable, mais les compositions restent extrêmement fortes. "Deeper Down", "One Wing" et "Country Disappeared" sont pratiquement les trois meilleures chansons que j'ai entendues cette année.

Ce que tu dis sur Neko Case, beaucoup de gens le disent - et ma foi, ce n'est pas faux. Aucun morceau de Neko ne m'est jamais resté en tête, à part peut-être "In California", qui n'est d'ailleurs pas d'elle.

Reste à savoir si le pouvoir d'une chanson à rester dans la tête est une condition sine qua non de sa qualité.

En fait, ce qui reste en tête et en mémoire, est le son de sa voix, sa mise en écho, et une atmosphère vaguement gothique, ou plutôt paradisiaque, ces dernières années.

L'architecture des musiques de Neko est éolienne, comme aspirée par une voûte de cathédrale. Elle a un sens de la beauté sonore, de l'appel des sirènes. Le tout est insaisissable, impalpable, comme à peine ébauché sur le plan de l'écriture. De toute évidence, elle est moins intéressée par la précision du dessin que par la suggestion d'une vision. Elle semble même être à la recherche d'une sorte d'achèvement dans la suggestion, dirais-je.

Comment parvient-elle à faire ce genre de disque sans se casser la gueule? Je crois qu'on le doit à sa ténacité à suivre la route qu'elle s'est tracée. Elle a en elle une forme d'intégrité, de radicalité. Elle sait ce qu'elle veut, et ce qu'elle ne veut pas.

Je ne suis pas sûr qu'elle puisse faire autre chose. Quoiqu'elle se soit illustrée correctement dans divers exercices de style, notamment chez les New Pornographers.

Ouais, je viens d'acheter ça (avec les deux précédents du groupe en passant) car j'ai tendance à penser, après quelques écoutes sur le net il y a quelques mois, que c'est le meilleur groupe anglais de ces vingt dernières années.

Le producteur est un gars de Queens of the Stone Age, il en résulterait un disque plus agressif et menaçant que les deux premières moutures, qui étaient plus juvéniles et bondissantes (pour répéter ce que j'ai lu ailleurs)

Première écoute, et elle est délicieuse! Surtout à partir de la deuxième partie. C'est vraiment subtil, travaillé, ciselé, du bon boulot par un groupe qui ne se fout pas de la gueule du monde (on dirait que ça devient rare, par les temps qui courent!).

Indubitablement un des tout meilleurs disques que j'ai écoutés cette année. Merci Yann.

A mon tour je te conseillerai le Julie Doiron, I Can Wonder What You Did with Your Day, qui est également au-dessus du panier, mais pour d'autres raisons - tout aussi élémentaires: on ne s'ennuie pas en l'écoutant, et c'est superbement mixé, avec fraîcheur et spontanéité. Il lui est arrivé d'être très monotone par le passé, mais depuis ses trois derniers albums, elle fait un sans faute.

Bon, ben a priori, mon Top 10 2009 sera au moins composé des albums suivants: Julie Doiron, Grizzly Bear, Arctic Monkeys, Plastiscines, Jill Sobule, Marissa Nadler.

Le reste est en ballottement: Niobe, Pains of Being Pure at Heart, Neko Case, Wilco, Eleni Mandell, Camera Obscura, Joe Henry, Amy Allison, Devon Sproule, Ana Egge, Po' Girl.

J'aurai avant la fin de l'année les nouveaux Anny Celsi, Butterfly Boucher, David Mead - et le Patty Griffin, s'il sort cette année.

Et comme d'habitude, les artistes auxquels je ne suis pas fidèle par hasard, finissent par me plaire davantage aux ré-écoutes... Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes, je savais que j'avais oublié d'être sourd. Ainsi Ana Egge ou Devon Sproule, qui provoquent l'impatience, méritent qu'on s'attarde sur leur musique tout en nuances.

Pourquoi diable me fallut-il quatre ou cinq écoutes pour que cet excellentissime album se révèle à moi?? C'est à mon avis son meilleur - et je les ai tous.

Là où les précédentes écoutes me laissaient une impression d'ennui, de ronron, sur la plupart des titres (et ce en dépit de la qualité du jeu), soudain mon ouïe ne lâcha pas le fil de la grâce. Car de grâce il s'agit bien, à moins que je n'aie la berlue - mais dans ce cas, je peux vous dire que la berlue est une merveilleuse maladie. Non, évidemment: ce fil n'est pas illusoire. Il est le produit d'une création experte.

Eleni Mandell est une Artiste. Jusqu'ici on le pressentait, on le souhaitait. Désormais, on en est convaincu.

A part affirmer ma conviction, me direz-vous, quelle sorte d'analyse ai-je à offrir ici? Aucune. Je n'ai pas envie d'analyser. Je suis sous le Charme.

"Et l'harmonie est trop exquise
Qui gouverne tout son beau corps
Pour que l'impuissante analyse
En note les nombreux accords."

(Baudelaire, Tout entière)

Je dis que la seule analyse louable de l'unité d'une oeuvre doit s'affranchir du décortiquement, et s'épanouir dans la traduction de cette unité. En quelque sorte, un bon critique se devrait d'être poète.

Ceux qui ont de la critique une notion limitative de stricte compétence dans le domaine de l'observation et de la description rabaissent son implicite vocation à leur vue de cloporte.

Un certain Thom Jurek est détesté dans le métier. Il est pourtant de ceux qui m'ont fait acheter des disques. De ceux qui ont l'humilité devant l'art, mais pas devant les moyens mis à sa disposition: l'expression. Celle-ci n'est jamais satisfaisante. Le langage n'est pas un outil, mais la chair-même de ce qu'on désire communiquer. Je préfère le conglomérat expressif d'une plume qui cherche à dire des choses - car cette plume est alors celle d'une âme humble devant l'horizon et la perspective du non-dit, voire prise par la fièvre de la quête - à l'appliqué objectiviste d'une plume qui s'efface devant la rigidité de l'argumentarisme, qui est celle d'une âme au repos, mûre pour l'encroûtement, et intrinsèquement inepte.

Nicolas Ungemuth avait encensé un précédent album de ce Jay Reatard, et je crois qu'il en a sorti un nouveau cette année.

En écoutant le document ci-dessous, j'évoque Marc Bolan, Daniel Johnston, les Replacements et les Pixies, ce qui ne peut pas être foncièrement mauvais.