Nouveautés 2008

Hugues a écrit:

Crois-tu qu'on puisse démontrer qu'il existe une valeur musicale en dehors de toute perception subjective? La question est intéressante, je me la pose toujours. Et dans le cas d'une réponse positive (je suis sûr que tu en es convaincu), est-ce qu'on doit alors façonner, faire fléchir notre sensibilité personnelle et immédiate à des observations plus objectives?

De ce que je peux en lire dans les forums, l'environnement mental des fans de rock me parait quand même bien conditionné par l'industrie du disque et ses succédanés (revues musicales)...Tel Jeff Buckley, PJ Harvey, Bjork ou Radiohead sont qualifiés de "génies" dans une forme de comprehension globale qui ne s'embarasse pas au fond de confronter la réelle valeur musicale de ces artistes avec ce qualificatif (si c'est "genial" ça peut pas être "nul" et inversement)...sinon avec des considérations musicales bien édulcorées...la sensibilité des mélomanes du rock indé contaminée par le binaire rock ?

Ce qui est sur, c'est que tu trouveras bien plus d'analyses musicologiques dans le jazz ou le Classique...des articles dédiés aux modulations chez John Coltrane, ça n'existe pas dans le rock ou l'on prefere miser sur des pellicules d'interventions beaucoup moins profondes pour qualifier la valeur objective d'un disque...
J'aimerais moi lire des textes uniquement sur la façon dont Jonnie Greenwood bousille la syntaxe guitaristique dans certaines chansons de Radiohead.

Maintenant ces methodes d'analyse qui te demontrent rigoureusement la complexité harmonique et melodique chez Pierre Boulez ou Duke Ellington et donc leur superiorité avec pour corollaire un mépris de toute musique populaire, éliminent elles de fait la valeur de sensibilités individuelles forcement abatardies par les industries de consommation...?(je sais pour en frequenter que les melomanes du Classique méprisent le rock).

Il existe cette voie que tu as décris dans ton précedent post pour sortir de cette impasse...
Je lisais recemment les superbes textes que Baudelaire a écrit sur Richard Wagner...son exegèse mise tout sur son intuition poétique et il se fout comme d'une guigne de toute causalité et de considerations musicologiques...et révèle en creux les limites des connaissance techniques pour apprehender l'impalpable de la musique...mais bon c'est Baudelaire...

Lee Harvey Oswald a écrit:
J'aimerais moi lire des textes uniquement sur la façon dont Jonnie Greenwood bousille la syntaxe guitaristique dans certaines chansons de Radiohead.

Je suis tout-à-fait d'accord. Il y a des choses à dire sur des disques de musique populaire, de façon musicologique peut-être, mais aussi sur certaines subtilités acquises par les artistes de musique populaire, sur des façons de changer d'accords, d'utiliser tel instrument à un moment, de choisir telle séquence, etc...

Pour ma part cela est motivé par mon besoin d'analyser ce qui m'apporte du bonheur. En ce moment j'écoute en boucle mes disques 2008, et j'apprends déjà à situer précisément à quel moment un disque commence à me conquérir. Cela me servira moins à justifier mes préférences, qui ne sont pas forcément les bonnes, qu'à savoir déjà exprimer ce que j'ai su saisir (puisque les sensibilités humaines ont mille-et-une facettes), et ainsi éclairer d'autres récepteurs sur mes perceptions.

Je lisais recemment les superbes textes que Baudelaire a écrit sur Richard Wagner...son exegèse mise tout sur son intuition poétique et il se fout comme d'une guigne de toute causalité et de considerations musicologiques...et révèle en creux les limites des connaissance techniques pour apprehender l'impalpable de la musique...mais bon c'est Baudelaire...

J'ai acheté deux vinyles de Wagner vers mes dix-sept ans après avoir lu ces pages. Et je me suis fait la même remarque en relisant ces textes la dernière fois. Baudelaire, en être spirituel désespéré, ne demandait à la musique que de le porter ailleurs. Son "oeuvre critique" fait preuve d'une liberté, et d'une subjectivité, totales. Mais ses analyses introspectives, très approfondies, sont passionnantes. Je doute qu'on les ait beaucoup lues à l'époque, cependant.

Je crois qu'il aurait aimé la musique populaire. Enfin, pas toute.

Juste une remarque en passant: que voilà des débats de haute tenue et que je prends plaisir à lire...

Parispal et Quiet Man, je vous en conjure, achetez ce disque. Vous ne serez pas déçu, j'en suis sûr à 200%. Parce que vous aimez les vrais songwriters, avec des parties de guitare en taillis (un régal à elles seules - écoutez "Wayne Rooney"!), qui retrouvent l'authenticité, l'honnêteté, la substance du genre. C'est LA révélation du folk en cette année 2008.

Hugues a écrit:

Parispal et Quiet Man, je vous en conjure, achetez ce disque. Vous ne serez pas déçu, j'en suis sûr à 200%. Parce que vous aimez les vrais songwriters, avec des parties de guitare en taillis (un régal à elles seules - écoutez "Wayne Rooney"!), qui retrouvent l'authenticité, l'honnêteté, la substance du genre. C'est LA révélation du folk en cette année 2008.

Fort de ton (bon) conseil, je m'en vais aller quérir quelques informations...

Hugues a écrit:

Parce que vous aimez les vrais songwriters, avec des parties de guitare en taillis (un régal à elles seules - écoutez "Wayne Rooney"!), qui retrouvent l'authenticité, l'honnêteté, la substance du genre.

You mean Wayne Rooney???

Si c'est le nom de ce footballer, alors oui je pense que c'est lui - Johnny Flynn étant anglais - du Sussex. Il y a d'ailleurs un mouvement folk revival TRES intéressant en Angleterre, on ferait bien de s'y pencher!

J'ai jeté un oeil sur les lyrics (http://www.metrolyrics.com/wayne-rooney-lyrics-johnny-flynn.html)
Entre le chasseur d"éléphants et le cafetier (bartender) qui ressemble à george Best (autre footeux rebelle célèbre dans les années 60), je n'ai pas compris si c'était un hommage ou une image!!

Hugues a écrit:

Parispal et Quiet Man, je vous en conjure, achetez ce disque. Vous ne serez pas déçu, j'en suis sûr à 200%. Parce que vous aimez les vrais songwriters, avec des parties de guitare en taillis (un régal à elles seules - écoutez "Wayne Rooney"!), qui retrouvent l'authenticité, l'honnêteté, la substance du genre. C'est LA révélation du folk en cette année 2008.

Jai suivi ton conseil, Hugues, et j'écoute "A Larum". Révélation? Peut-être? Folk? Pas vraiment, de mon point de vue. Mais les étiquettes importent peu. Il y a un côté fête (une ambiance de fête foraine même) qui me fait penser à des Pogues propres et commençant seulement à boire. Mais Flynn est un nom irlandais à l'origine, et son "Sussex Wit" n'a pas réussi à gommer l'atavisme (et la comparaison avec MacGowan est un compliment).

Bref, tu ne t'étais pas trompé, j'aime, même si (parce que?) ça ne ressemle à rien de ce quej'ai écouté récemment.

Attention, le folk anglais n'est pas le folk américain - mais je suppose que je ne t'apprends rien.

Flynn est quand même plus acoustique que les Pogues, qui eux-mêmes revendiquaient l'héritage folk ("Dirty Old Town" et le reste). En tout cas la filiation est celle des Iles britanniques et irlandaise. Chez lui défilent les fantômes d'A.L. Lloyd et Ewan MacColl, et plus généralement des flibustiers qui ramenèrent des chansons dans leurs filets... mais Flynn ajoute volontiers violons et cuivres pour donner plus d'ampleur au rythme des flots. C'est à la fois rustique et lyrique.

Il y a aussi un petit côté fête foraine, oui, pourquoi pas. De ces forains médiévaux qui se refilaient des ballades légendaires. Mais si j'en juge par "Wayne Rooney", Flynn est carrément contemporain dans son approche.

Hugues a écrit:Attention, le folk anglais n'est pas le folk américain - mais je suppose que je ne t'apprends rien.

Certes, mais qu'aurait été Bob Dylan sans l'influence de gens comme Martin Carthy?

Hugues a écrit:Flynn est quand même plus acoustique que les Pogues, qui eux-mêmes revendiquaient l'héritage folk ("Dirty Old Town" et le reste). En tout cas la filiation est celle des Iles britanniques et irlandaise. Chez lui défilent les fantômes d'A.L. Lloyd et Ewan MacColl, et plus généralement des flibustiers qui ramenèrent des chansons dans leurs filets... mais Flynn ajoute volontiers violons et cuivres pour donner plus d'ampleur au rythme des flots. C'est à la fois rustique et lyrique.

Il y a aussi un petit côté fête foraine, oui, pourquoi pas. De ces forains médiévaux qui se refilaient des ballades légendaires. Mais si j'en juge par "Wayne Rooney", Flynn est carrément contemporain dans son approche.

En tout cas, il donne envie de le réécouter... Cela dit, quest-ce qui est folk, qu'est-ce qui ne l'est pas? J'ai renoncé à trouver une réponse ou plutôt j'en ai trouvé trop, qui varient à l'infini... Et puis tout est dans tout (et réciproquement)...

Pas mal, la pochette - tu penses quoi de l'album?

Hugues a écrit:Pas mal, la pochette - tu penses quoi de l'album?

Pas encore écouté... D'après ce que je j'ai lu, Neal reviendrait à des basiques plus "roots" que sur ses derniers albums.

Bon, et bien, je viens de m'acheter ce disque cette apres-midi et ... comment dire ? ... je me demande vraiment comment j'ai pu passer a cote. Je l'avais entendu il y a quelques mois chez une amie et ca ne m'avait pas particulierement marque. En fait, j'avais meme fait une blague comme quoi le chanteur sonnait comme Demis Roussos ... et bien, retournement de veste total en ce qui me concerne ! Rook est une merveille de pop arrangee, subtilement manieree. Ca ressemble a du Mark Hollis, c'est en quelque sorte un disque de rock progressif sans les soli de claviers et de guitare. Il n'y a pas un mauvais morceau sur ce disque. C'est d'une beaute absolument stupefiante. Tout semble couler de source, chaque isntrument est a sa place et la voix, bien au milieu, est tout simplement formidable quuand on a la bonne disposition d'esprit pour l'apprecier. On a l'impression d'ecouter un futur classique et la pochette, simple et magnifique, ne fait que renforcer cette idee.

Il y a certainement un disque plus beau qui soit sorti cette annee, mais je suis sur de ne pas l'avoir (encore) entendu.
En prime, un petit extrait musical :